Page:Marais - Pour le bon motif.djvu/190

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partage légal du cœur paternel, des soins maternels, des héritages, des dots, divise perpétuellement les enfants entre eux en les plaçant sur ce pied d’égalité qui crée les rivalités.

À l’état apparent, les frères et sœurs se manifestent, dans le cours monotone de la vie quotidienne, cette familiarité amicale, cet attachement d’habitude résultant d’une enfance commune. Mais que se produise un conflit mettant leurs intérêts en présence, et la haine latente éclate ; et l’ancestral Caïn se révèle soudain, rappelant aux fils des hommes que le premier crime fut un fratricide.

À cet instant, Suzanne détestait ses sœurs. Elle s’abandonnait d’autant plus volontiers à la violence de ses impressions qu’elle avait la conviction que le bon droit, la justice et l’honnêteté se trouvaient de son côté.

Gilberte allait se déshonorer par faiblesse, par ambition et par amoralité. Denise la poussait à cette turpitude, perdant la notion du bien dans son désarroi d’amoureuse.

Suzanne, elle, avait la certitude d’agir au nom des principes. Seule, elle pouvait garder