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Page:Marais - Trio d amour.pdf/65

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songeait qu’au moyen de mettre son projet à exécution, coûte que coûte. Douée d’une imagination ardente qui lui avait valu tous les premiers prix de composition française, durant ses études ; qui avait adouci ses déboires en peuplant ses rêves de revanches merveilleuses ; mais qui l’incitait fréquemment à dénaturer la réalité, Adrienne faisait appel à ses facultés inventives, élaborant déjà une dizaine de plans romanesques.

Elle descendait la rue Scribe d’un pas nonchalant ; un peu alanguie ; fatiguée à force de réfléchir, d’agencer cent histoires invraisemblables. Elle tâtait, entre les mailles de sa bourse, les deux pièces de cinq francs qu’elle avait compté dépenser le soir même. De ce qu’il ne remplirait point l’usage auquel il était destiné, cet argent perdait toute sa valeur aux yeux d’Adrienne. Elle eût éprouvé une âpre satisfaction à gâcher cet argent inutile ; à le gaspiller, dans un mouvement d’horripilation passagère.

Et tout à coup — de se sentir les jambes lasses et d’apercevoir les beaux automobiles de place rangés devant le Grand-Hôtel — Adrienne décida :