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Page:Marat - Les Pamphlets, 1911, éd. Vellay.djvu/335

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instances ; Roland le porta au conseil exécutif, qui décida, pour couvrir sa malveillance, de renvoyer à l’examen de la section mes manuscrits, qui étaient entre les mains du ministre de l’intérieur ; c’était me renvoyer aux calendes de Mars, ou plutôt au jugement dernier, vu la grandeur de ces ouvrages et la multiplicité des affaires dont ma section est accablée.

Comme je n’aime point perdre le temps à valeter, je romps ici avec Roland pour m’adresser à vous, Louis-Philippe d’Orléans, vous que le ciel a comblé des dons de la fortune, vous à qui la nature donna en partage l’âme d’un simple citoyen, vous à qui la sagesse doit donner le cœur d’un franc patriote ; car, comment se le dissimuler, dans l’état actuel des choses, vous ne pouvez plus faire votre salut qu’avec les Sans-Culottes ?

Vous en êtes l’émule, soyez-en le bienfaiteur ; au nom de la patrie, concourez aujourd’hui à la propagation des lumières nécessaires au salut public, en fournissant à l’Ami du Peuple les moyens de mettre ses ouvrages au jour sans délai. La modique somme de 15 000 livres suffira à l’achat du papier et à la paie de la main-d’œuvre ; qu’elle soit confiée au comité de surveillance de la section de Marseille, qui la délivrera à mesure, en justifiant de l’emploi. Si vous le trouvez bon, un nombre d’exemplaires équivalent à cette somme, et portés au prix coûtant, sera distribué gratis, et en votre nom, aux citoyens de tous les départements hors d’état d’en faire l’acquisition, ou bien la somme vous sera remboursée sur le produit de la vente ; l’Ami du Peuple ne demande ces secours qu’à titre d’avances, et il se flatte de les obtenir de votre civisme. Dénués d’argent pour le service de leur maître, les généraux espagnols trouvaient des sommes considérables sur leurs moustaches ; pour toute sûreté, l’Ami du Peuple vous engage sa réputation civique. Sera-t-il refusé de vous ?