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sabine

La comtesse fit claquer sa langue et regarda l’artiste d’un air fripon.

— Je vous ai annoncé comme une de mes amies, venue pour étudier les mœurs des harems. Ce brave Ibrahim m’a crue sur le coup et voulait, dès aujourd’hui, vous rendre visite. J’ai dû lui taire votre demeure, ce qui a été difficile, et parler de vos justes susceptibilités européennes, de vos effarouchements à l’anglaise… Demain, il est capable de ne pas oser vous toucher le bout des doigts… Ah çà, vous resterez dans votre rôle, hein ? savez-vous qu’il irait de la vie pour vous, sinon pour moi ?

Duvicquet affecta une nonchalance de giaour et se caressa, par habitude, un crin absent.

— Qu’ont dit les femmes de Sidi Mohammed ? demanda-t-il.

— Oh ! elles ont laissé éclater une joie… Songez donc à l’honneur qui leur est accordé ! Une matinée chez le Bey ! jamais elles n’y auraient prétendu.

— Je suis capable de ne pas reconnaître les yeux de gazelle qui m’ont amené à couper ma barbe. Et, cependant, j’ignore quel coup de sabre les a fendus, mais je vous jure bien qu’ils sont grands comme ça…

— Cela s’accorde à merveille, continua Mme de Lupan, Rachel est encore à Gênes ; elle eût brouillé les affaires avec sa pétulance s’il elle avait été ici. À nous deux, nous nous en tirerons supérieurement ! À présent, mon ami, vous allez venir