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Page:Marc de Montifaud Sabine 1882.djvu/227

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sabine


II


Au sixième étage d’une maison située au no 126 du faubourg Saint-Antoine, cinq ou six personnes se relayaient depuis deux heures auprès de la couche infecte où était étendue une femme morte, d’à peu près trente-cinq ans. Le décès remontait à la veille au soir. Les voisines s’empressaient de leur mieux pour emmener l’enfant de la défunte, petite fille de treize ans, qui, plus impassible qu’on ne l’est à cet âge en présence d’une situation pareille, ne sanglotait ni ne pleurait. Seulement, un tremblement agitait ses membres et faisait souvent claquer ses dents, comme si le froid du dehors l’eût atteinte ; mais l’enfant, quelques sollicitations que l’on tentât, s’obstinait à demeurer là jusqu’à l’arrivée des croque-morts. Lasse de l’appeler, une des braves locataires du palier avait fini par lui apporter une assiettée de soupe et un verre de vin, qu’elle déposait sur la table :

— Tiens, ma fille, lui dit-elle amicalement, mange un peu de cette soupe et bois une gorgée.

— C’est vrai, ajouta la concierge arrivée à son