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prologue

de telles mines effarouchées qu’il se sentait littéralement aux abois ; son exaltation grandissait d’instant en instant. Ce malheureux Mohammed, possesseur de quatre femmes, aurait bien pu se donner la peine de veiller davantage sur son harem ; car, enfin, tout venait de l’imprudence de l’eunuque qui s’était complaisamment prêté à ce que, dans une promenade, Arroukba relevât son féridjé.

Duvicquet se taisait, plein d’amour, plein d’angoisse, lorsque deux petits bras serrèrent sa taille :

Rani meh’rog ouenh’ebdek ! répétait la voix d’or.

Le peintre ne put résister davantage, et, enlaçant Arroukba, baisa ses lèvres et ses seins tremblants. Soudain des cris furent poussés si près des deux fugitifs qu’il leur devenait impossible de se méprendre au sujet de la scène qui allait se passer.

Duvicquet se leva du bord de la cuve en pierre, oublia une minute Arroukba, et vint coller son œil à la fente du treillis. Là, il aperçut une demi-douzaine d’eunuques dans des attitudes de maîtres d’école, fouettant vigoureusement, à tour de bras, les hanums dont les cris se changeaient en hurlements et eussent ameuté une garnison. Il n’y avait rien à dire, le Bey usait du droit légitime de faire corriger ses houris… par les endroits où elles s’offraient le moins endommageables : c’était une question de discipline. Pour les cas de criminalités plus sérieuses, il eût été obligé de les livrer au cadi.

Stupéfait, Duvicquet faillit renverser la mince