Aller au contenu

Page:Marcel Schwob - Œuvres complètes. Écrits de jeunesse.djvu/249

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


La forêt se rendort. Soudain, froissant les branches,
Une biche craintive avance jusqu’aux hanches
Et, l’œil humide (35), va plus loin flairer le sang.

Mai 1888.

L’Obus

La Seine, au Pont des Arts, a pris de noires teintes.
L’eau clapoteuse bat les fûts verts des piliers,
Gravit en murmurant les marches d’escaliers.
Les lanternes des quais se sont toutes éteintes.

Soudain, sur les deux bords retentissent des plaintes,
Hennissements, sursauts, jurons de cavaliers,
Piétinements confus, pesants de fusiliers,
Les cloches du beffroi tintent très haut par quintes.

Un sifflement sonore ulule dans la nuit,
Miaulement mortel d’un tigre qu’on poursuit
Et qui, saignant du cœur, se redresse et succombe.

Entre les quais obscurs fuse une gerbe d’or ;
La détonation soulève l’eau qui dort
Au fulgurant éclat des flammes de la bombe.

Juin 1888.

Ta fine bouche est un fil rose
Tendu sur un masque de soie,
Ta chevelure qui s’éploie,
Est-ce un arc-en-ciel qui se pose ?