Page:Marcel Schwob - Œuvres complètes. Écrits de jeunesse.djvu/257

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Ta bouche épanouie en fleur de paradis,
Est le but des baisers que vers toi ma main lance !

Lorsque, sous l’or du soir, bien-aimé, tu blondis,
Lorsque ta tête rose et pâle d’indolence,
Tombe sur mon épaule et sourit, je m’élance
Pour posséder sans crainte au fond des bois tiédis
Ta bouche épanouie en fleur de paradis.



Ô mot, tu n’es qu’un moule où j’ai jeté mon rêve,
Un moule bouillonnant, un moule frémissant,
Et sous le flot d’airain écumeux qui te crève,
Tu ne peux résister, ô moule incandescent !
Tu façonnes l’idée à tes lèvres de terre,
Entourant de tes plis son jet impétueux
Qui creuse dans tes flancs un rougeoyant cratère,
Sifflant et s’enfuyant en sillon tortueux.

La Madone amoureuse

Le ciel noir se piquait de torches résineuses,
Scintillantes lueurs, astres pâles d’amour.
Secouant du zénith leurs vapeurs lumineuses
En nuages d’encens au brasier du jour.

. . . . . . . . . . . . . . . . . .


Se lustrait du vermeil bruni d’un disque pur,
Cœur jaunissant de fleur immobile et plantée
Comme une pâquerette aux mornes champs d’azur,

À travers l’infini sombre de l’étendue
La blancheur de la Vierge immense s’allongeait,
Colosse de vapeur vaguement épandue
Où le glaive éclatant de la lune plongeait.