Page:Marceline Desbordes-Valmore - Poèmes inédits, 1946 (Revue Lettres).pdf/14

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» Comme il parle à sa mère ! Oh ! viens voir comme il l’aime !
» Pour toi, si je pouvais, ce serait tout de même !…
» Comme il lui parle ! écoute ! et comme elle répond
» À cette voix de fils où le ciel se confond ! »


FRAGMENT

Noi si am’vermi nati
A formar l’angelica farfalla.

Dante.

Si Dieu l’avait voulu, je serais là. Ma cendre
Jetterait quelques fleurs sous les pieds du passant,
Et parmi le chemin j’écouterais descendre
Vers moi, d’un filet d’eau le bruit rafraîchissant.
Je le croirais venu de la belle cascade
Qui parlait, souviens-t’en, à notre cœur malade
Sur la route brûlante… Oh ! souviens-t’en toujours
Où je te ramenais, jeune âme de mes jours !
Où, sous tant de soleil, j’ai vu tomber tes larmes.
Pleure, près des jardins si pleins d’ombre et de charmes,
Sur ces monts où l’oiseau vole et couve sans peur !
Oui, nous pleurions à deux car le monde est trompeur ;
La surprise fermait nos lèvres consternées ;
Nous n’avions pas rêvé de telles destinées…
Et l’une plaignant l’autre au splendide chemin,
Nous marchions le front triste en nous tenant la main.
De nos deux voix ta voix nous revint la première
Et ton doux regard bleu m’envoya sa lumière.

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