Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/261

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a spontanément daigné m’offrir les rênes de l’État comme au plus digne ; à moi si éloigné de désirer cette glorieuse investiture ou de m’y attendre.

(7) Mais le droit que vous aviez incontestablement avant que l’empire eût un chef, vous l’avez utilement exercé dans toute sa plénitude. Vous venez d’élever à cet insigne honneur un homme dans la maturité de l’âge, et dont toute la vie vous est connue comme sans tache et non pas sans gloire. Qu’attends-je de vous maintenant  ? une attention bienveillante aux idées que je vais vous exposer dans l’intérêt commun.

(8) Que l’association d’un collègue à mon pouvoir soit commandée par la multiplicité des soins qu’une telle position entraîne, c’est ce que je n’hésite ni ne répugne à reconnaître. Je suis le premier à redouter pour mon compte et le fardeau présent, et les exigences que l’avenir tient en réserve. Mais le partage de l’autorité veut avant tout la concorde. Avec la concorde on n’est jamais faible ; et cette condition, il nous sera facile de l’obtenir si, comme j’ai le droit de le réclamer, votre patience s’en rapporte à mon libre arbitre.

(9) La fortune, propice aux bonnes intentions, me secondera, je veux le croire, dans la recherche d’un choix tel que le veut la sagesse. Ceci est un axiome sans doute aussi applicable au pouvoir, entouré comme il l’est d’embarras et de dangers, qu’il peut l’être à la vie privée : en fait de communauté il faut que l’examen précède le contrat, et non le contrat l’examen.

(10) Je m’engage à observer cette règle, et nous en verrons les heureux effets. Allez donc, aussi disciplinés que braves, vous reposer dans vos quartiers, et employez à réparer vos forces ce que la saison vous permet encore de loisirs. La gratification d’avènement ne se fera pas attendre."

(11) Cette improvisation, débitée d’un ton d’autorité, ramena tous les esprits au devoir ; et ceux-là même se montrèrent les plus soumis, qui naguère vociféraient avec le plus de violence. L’empereur fut respectueusement reconduit au palais, enseignes déployées, les divers ordres formant cortège. On commençait à trembler.

Chapitre III

(1) Pendant que ces événements se passaient en Orient, Apronien, alors préfet de la ville éternelle, déployait dans cette fonction les qualités d’un juge probe et sévère. Sa plus vive sollicitude, au milieu des soins de toute espèce dont l’administration de cette ville est surchargée, était de faire appréhender, convaincre et juger les magiciens (classe de délinquants déjà plus rare), de leur arracher l’aveu de leurs complices, et de les faire mettre à mort, afin de terrifier par l’exemple ceux qui auraient pu se soustraire à son regard.

(2) Nommé par Julien pendant le séjour de ce prince en Syrie, Apronien perdit un œil en se rendant à son poste, ce qu’il attribua aux ténébreuses pratiques de la magie. De là cette rancune légitime, et les ardentes perquisitions qu’il dirigea contre ce genre de délit. On jugea cependant qu’il allait trop loin, quand on le vit traiter quelquefois ces affaires capitales en plein cirque, au milieu de la foule qui s’y presse pendant les représentations.

(3) La dernière exécution qu’il ordonna pour cette cause fut celle du cocher Hilarin, atteint et convaincu