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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

MADAME B.

Elle ne peut l’avoir avant l’expiration du terme des baux. Pendant toute la durée de son bail, le fermier jouit de tous les gains et souffre de toutes les pertes qui surviennent occasionnellement. Mais lorsque le bail se renouvelle, il ne peut manquer d’être réglé sur le taux commun des profits, et de hausser ou de baisser en proportion des gains que le fermier espère ; de sorte que tous le surplus va au propriétaire, tandis que le fermier se contente des profits ordinaires de son capital. Il peut arriver sans doute, par ignorance, par négligence, quelquefois par des motifs d’humanité, que le propriétaire n’exige pas tout ce que le fermier serait en état de payer, mais ce sont là des circonstances accidentelles, et l’on considère comme la vraie rente tout le surplus du produit. Le contrat entre le fermier et le propriétaire est naturellement en faveur de ce dernier, par la raison que voici : tout homme qui a un petit capital est capable de s’engager comme fermier ; et comme toute l’étendue des terres mises à ferme est limitée, il y a toujours plus d’hommes qui désirent prendre des terres à ferme qu’il n’y en a qui veulent en mettre à ferme. Les propriétaires de terres peuvent donc être considérés comme exerçant une espèce de monopole envers les fermiers, parce qu’ils possèdent une marchandise dont la demande excède l’offre. Ainsi la concurrence pour l’obtenir, permet au propriétaire d’exiger du fermier la plus forte rente qu’il puisse payer ; en d’autres termes, de le contraindre à lui abandonner tout le surplus du produit.

CAROLINE.

Je n’entends pas très-bien le sens de ce mot monopole ; mais j’ai toujours cru que c’était une chose injuste et disconvenable.

MADAME B.

Le monopole est un privilège exclusif, accordé à une ou plusieurs personnes, de posséder ou de vendre quelque marchandise particulière. Quand c’est le gouvernement qui l’accorde, il est généralement préjudiciable, parce qu’il empêche la libre concurrence des autres vendeurs, qui ferait baisser le prix de la marchandise en question. Si, par exemple, un certain nombre de personnes étaient exclusivement privilégiées pour faire le commerce du thé ou du café, comme il n’y aurait point de marchands rivaux qui pussent entrer