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CONTES POPULAIRES

« Eh bien, je vous dirai, milord, que l’oncle Bob et mon fils Tom prétendent que nous ne gagnons ni ne perdons par le commerce que fait notre pays avec l’étranger. Vous me direz peut-être, ajouta Hopkins d’un air un peu embarrassé, que je ferais mieux de songer à mes affaires, que de me remplir la tête de choses au-dessus de ma portée.

— Je suis loin de penser que ce ne soit pas votre affaire, que de vous occuper des intérêts de votre pays ; c’est non-seulement le droit, mais le devoir de tout Anglais libre. Nous ne sommes pas, Dieu merci, dans un pays où on ait peur d’apprendre au peuple à distinguer ce qui est bien de ce qui est mal, même dans les choses qui concernent le bien-être du pays ; on cherche, au contraire, à répandre l’instruction dans toutes les classes de la société.

— Votre honneur a raison, car il se fait plus de mal par ignorance que par intention de mal faire.

— Je suis tout à fait de votre avis, John ; mais pour l’oncle Bob et votre fils, ils se sont un peu fourvoyés, en disant que le pays ne retire ni perte ni gain de son commerce avec l’étranger ; car lorsque deux pays font le commerce librement ensemble, ils y gagnent tous deux : mais ceci demande quelques explications que je vais vous donner. Les marchandises que nous recevons de l’étranger y étant produites ou fabriquées à plus bas prix que chez nous, il est de notre intérêt de les faire venir plutôt que de les faire produire ou fabriquer dans le pays.

Ainsi, par exemple, cette pièce de soierie que vous avez là sur votre table vient de France ; elle doit coûter moins que la soierie anglaise, car on fabrique en France les étoffes de soie mieux et à meilleur marché qu’ici. Vous comprenez alors comment il sera plus avantageux pour nous de tirer de France nos soieries, plutôt que de les faire fabriquer dans le pays.

— Sans doute, reprit John ; mais votre honneur dit que les Français gagnent aussi à faire le commerce avec nous, et il me semble à moi que nos bénéfices doivent être une perte pour eux.

— Comment donc, John ? Écoutez-moi bien ; voici un exemple du contraire. Nous avons des mines de fer considérables qui n’existent pas en France : aussi sommes-nous plus habitués et par conséquent plus habiles à travailler le fer ; nous fournissons à la France une grande quantité d’outils et d’instruments de fer en échange