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INSOCIABILITÉ

Voilà le modèle, peint par lui-même, que certains de nos compatriotes croient avantageux de copier. Pour ceux qui se complaisent ainsi dans une basse et servile imitation, les Anglais ont inventé un mot : flunkeys dont en Français singeurs ou moutons de Panurge ne sont que de pâles synonymes. Thackeray, le Juvénal anglais, a écrit une de ses plus amusantes satires sur le flunkeyism.

Je ne m’arrêterai pas à vérifier l’assertion de notre très modeste confrère anglais sur la cause de la corruption de nos habitudes.

Qu’elle soit ou non due à une fréquentation pernicieuse (evil communications), peu importe au fond. Bornons-nous à dénoncer cet oubli de tout savoir-vivre qu’on voit aujourd’hui s’étaler dans nos salons et le mépris des convenances affecté par le sexe fort, qui semble trouver indigne d’un homme sérieux d’être poli. Reconnaître son erreur c’est déjà avoir fait un grand pas. Et justement l’aveuglement de ces messieurs, la sérénité de leur conscience ignorant le remords, la certitude qu’ils ont d’être corrects, sont les premiers obstacles à vaincre pour arriver à une amélioration. N’a-t-on pas vu un jour certain blanc bec, n’ayant pour toute autorité, comme dit l’autre, que « de l’audace, une redingote et des relations, » venir statuer que les hommes avaient accompli tous leurs devoirs sociaux quand une fois ils avaient prié leur femme de déposer une carte pour eux chez les gens qu’elle visite ?

Les cartes, en vérité, les maris en abusent. J’imagine que leur vanité nous saura gré de le leur reprocher. Oui, messieurs ; ces petits cartons ayant la prétention de vous représenter, qui emplissent nos corbeilles, ne réussiront jamais à nous consoler de votre absence ni à excuser votre négligence.

Quelles bonnes raisons donnez-vous en somme pour vous soustraire ainsi à toute espèce d’obligations ? Que le temps vous manque… Que vos nombreuses occu-