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CONFÉRENCES


LE DÉVELOPPEMENT DE LA LITTÉRATURE
NATIONALE


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(Traduction du travail lu à la convention du « Conseil national des Femmes », à Toronto, au mois de mai 1895.)


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Je suis venue ici en mission charitable. La défense d’une aussi pauvre et impopulaire cliente que la mienne ne saurait être mieux définie. La culture des lettres est considérée dans notre pays comme un divertissement onéreux permis au seul riche, comme le dada de quelques femmes excentriques ou peut-être, comme la dernière ressource des paresseux, des ratés, des rêveurs, de tous ceux enfin qui n’ont pas su se faire une carrière de la politique, du droit, du commerce, ou de quelqu’occupation convenable.

J’en peux donner un exemple caractéristique.

Un officier du cens frappa un jour à la porte d’un journaliste français :

— Qui est-ce qui habite ici ? demanda-t-il, écrivant déjà.

— Monsieur Provencher, répondit la bonne.

— Quelle profession ?…

— Oh ! il ne fait rien, il écrit tout le temps !

Naturellement les fidèles et les dévots d’un art superflu, les liseurs et les lettrés sont également des gens un peu singuliers — des personnes privées de relations sociales peut-être, ou ayant des habitudes de paresse, ou