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Si c’est trop loin, Cuba, qu’on prenne d’autres mesures pour assurer le salut public.

Pourquoi ne pas céder un espace de terrain aux perturbateurs assis, hors de la ville, loin de nous.

On pourrait alors aller regarder — de ce côté-ci de la clôture — cette sorte de centaures civilisés se livrer librement à son besoin de destruction et s’entr’écraser à loisir.

Vous augurerez mal de mes dispositions à l’égard des coureurs immobiles par ce qui précède ; je ne vous ai pourtant encore rien dit de la peste qu’ils sont dans l’ordre moral.

Ils sont là bien autrement et plus gravement perturbateurs, en ce qu’ils sont constamment partis. Les absents ont toujours tort ; c’est surtout vrai des pères de familles, des écoliers et des jeunes filles. Pour ces deux dernières catégories, le tort se double par le fait qu’ils sont partis… ensemble.

Quand des parents complaisants offrent une paire de roues à leur ingénue, c’est comme si, de leurs propres mains, ils lui accrochaient des ailes pour s’envoler loin d’eux. Cela équivaut à signer volontairement l’abdication de son autorité.

Quand on possède une bicyclette, n’est-ce pas, ce n’est pas uniquement pour faire des ronds devant la porte, sous le vigilant regard maternel.

Ces roues sont d’affamées mangeuses d’espace, gourmandes des longs chemins unis, folles du vertige de la vitesse. Ces véloces montures ne bougent pas qu’elles ne s’emballent ; il leur faut les grandes routes libres et leur premier bond les met déjà hors de vue.

Si ce n’est encourager et consommer l’émancipation de ses enfants que de leur faire un pareil cadeau, je voudrais bien que l’on m’indiquât une plus libérale façon de leur donner la clef des champs.

J’ai hâte de voir aussi quel télescope on inventera pour l’usage des mamans obèses, mais inquiètes de ce