Page:Marchant de Beaumont - Manuel et itinéraire du curieux dans le cimetière du Père la Chaise.djvu/271

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qu’il honora, qu’il revivifia par la sublimité de sa pensée, par l’expression de la nature, par la vérité de son sentiment, de son coloris, de son dessin austère.

Bientôt les regards se fixent presqu’involontairement sur la multitude des sépulcres qui s’élèvent dans le vallon prochain. Quel est leur nombre ! ils sont religieusement recouverts de monumens, de cyprès, de saules pleureurs, de fleurs ; ils renferment la cendre de mes contemporains, de mes proches, de mes amis avec lesquels je respirais hier. Chaque moment où je vis m’appelle près d’eux, dans leurs sombres, demeures. A leur aspect naissent les plus graves pensées : demain, dès demain peut-être serai-je près d’eux dans leur poussière… Un secret, un involontaire effroi saisit le cœur le plus ferme, menacé d’un tel sort, et l’homme n’en devient point meilleur.

Les larmes de cinq mille ouvriers pleurant N dans la personne de M. Lenoir-Dufresne, leur bienfaiteur et leur père, ne l’affranchirent point du trépas. La mort fut insensible aux gémissemens des mères dont madame du Fougeret sécha les pleurs en fondant la société de la Charité maternelle ; elle laissa parvenir à la vieillesse le chansonnier Laujon, toujours chantant, toujours riant, toujours faisant de l’esprit pour charmer ses ennuis, et toujours probe pour