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Page:Marco Polo - Le Devisement du monde, 1556.djvu/179

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Du grand fleuve de Caromoran, & des villes de Corgangui & Caigui.     Chap.   LII.



En continuant le premier chemin, on rencontre une grosse riviere appellée Caromoran, qu’on dict avoir sa source & origine du royaume de Prestejan. Elle tient de largeur plus d’un grand quart de lieuë, avec une telle & si grande profondité, que les gros navires chargez y peuvent aisement monter & avaller : oultre elle est fort abondante & copieuse en poissons, dont on faict de belle pescheries. Assez pres de la bouche de ce fleuve, a l’endroict ou il se desgorge en la grand mer Occeane, y a environ de quinze mil navires que le grand Cham facit tenir tousjours prestes & garnies de toutes munitions, affin que si le cas advient qu’il soit necessaire passer son armée es Isles de la mer circonvoisines, cela puisse estre facilement & promptement executé. Les aucuns de ces navires sont si grandz, qu’ilz sont capables de recevoir & loger quinze chevaulx, & autant d’hommes, avec tous leurs vivres & fourrages necessaires. Et en chacun navire y a environ de vingt nautonniers & pilotes. Sur les rivages de ceste riviere, & pres l’endroit de la station des navires y a deux belles villes, l’une appellée Corgangui, & l’autre Caigui. Ceste riviere passée, on entre incontinent en la noble province de Mangi : les louanges & singularitez de laquelle seront declairez es chapitres subsequens.