Page:Marco Polo et al. - Deux voyages en Asie au XIIIe siècle, 1888.djvu/131

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premièrement passé au feu par eux, et ils ont leur part et portion de tout. Ils purifient aussi par le feu tous les meubles des défunts. Aussitôt que quelqu’un est mort, tout ce qui lui appartenait est séparé des autres meubles, et on ne les mêle point avec ce qui est de la cour, jusqu’à ce que tout soit purgé par le feu. J’en ai vu user de la sorte au logis d’une certaine dame qui mourut pendant que nous y étions.

Leur coutume est aussi d’assembler au neuvième de la lune de mai toutes les juments blanches qui se trouvent dans leurs haras et de les consacrer à leurs dieux. Et à tout cela les prêtres chrétiens étaient contraints d’assister avec leurs encensoirs. Ils épandent de leur nouveau koumis par terre et font une grande fête quand ils commencent à en boire de frais fait ; ainsi qu’en quelques lieux parmi nous, quand on goûte du vin aux fêtes de saint Barthélemy et de saint Sixte, et que l’on goûte des fruits le jour de Saint-Jacques et de Saint-Christophe.

Ces devins sont aussi appelés à la naissance des enfants pour prédire leurs destinées ; quand quelqu’un tombe malade, on les envoie quérir aussitôt, afin qu’ils usent de leurs charmes sur le malade ; ils disent si la maladie est naturelle ou si elle vient de sortilège. Sur quoi cette dame de Metz, dont j’ai parlé ci-dessus, m’apprit une chose étrange arrivée de cette sorte : c’est qu’un jour on avait présenté à sa maîtresse, qui était chrétienne, comme j’ai dit, des fourrures fort précieuses que les devins passèrent aussitôt par le feu ; mais ils en retinrent pour leur part plus qu’il ne leur en fallait ; une certaine femme qui avait la charge des riches meubles de cette dame les en accusa, ce dont la dame leur fit un grand reproche ; mais il arriva peu de jours après que cette dame devint grièvement malade et souffrait de très grandes douleurs en tous les endroits de sa personne. Sur quoi ces maîtres devins furent appelés, et, s’étant assis un peu éloignés de la malade, ils commandèrent à une de ses femmes de mettre la main à l’endroit où était sa plus grande douleur, et si elle y