Page:Marco Polo et al. - Deux voyages en Asie au XIIIe siècle, 1888.djvu/149

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gnes. Nos Vénitiens, d’un autre côté, faisant réflexion qu’il leur était impossible, sans un grand danger, de retourner en leur pays, résolurent d’aller avec l’ambassadeur trouver l’empereur des Tartares, menant encore avec eux quelques autres chrétiens qu’ils avaient amenés de Venise. Ils quittèrent donc Bochara ; et, après une marche de plusieurs mois, ils arrivèrent à la cour de Koubilaï[1], le plus grand roi des Tartares, autrement dit le Grand Khan, qui signifie roi des rois[2]. Or la raison pourquoi ils furent si longtemps en chemin, c’est que marchant dans des pays très froids qui sont vers le septentrion, les inondations et les neiges avaient tellement rompu les chemins que, le plus souvent, ils étaient obligés de s’arrêter.

III
Avec quelle bonté ils furent reçus du Grand Khan.


Ayant donc été conduits devant le Grand Khan, ils en furent reçus avec beaucoup de bonté ; il les interrogea sur plusieurs choses, principalement des pays occidentaux, de l’empereur romain et des autres rois et princes, et de quelle manière ils se comportaient dans leur gouvernement, tant politique que militaire ; par quel moyen ils entretenaient entre eux la paix, la justice et la bonne intelligence. Il s’informa aussi des mœurs et de la manière de vivre des Latins ; mais surtout il voulut savoir ce qu’était la religion chrétienne, et ce qu’était le pape, qui en est le chef. À quoi nos Vénitiens ayant répondu le mieux qu’il leur fut possible, l’empereur en fut si content qu’il les écoutait volontiers et qu’il les faisait souvent venir à sa cour.

  1. Koubilaï-Khan ou Chi-Tsou, empereur mongol, petit-fils du fameux Gengis-Khan, fondateur de la vingtième dynastie. Il réunit la Chine à son empire, qui comprit ainsi la Tartarie, le Bégu, le Tibet, le Tonkin, etc. (1214 à 1294)
  2. D’après Rubruquis (chap. XIX), la désignation khan aurait la signification de devin.