Page:Marco Polo et al. - Deux voyages en Asie au XIIIe siècle, 1888.djvu/162

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aviez de la foi grande comme un grain de moutarde, vous diriez à cette montagne : transporte-toi là, et cela arriverait, et il n’y aurait rien d’impossible pour vous. À présent donc, si vous avez une vraie foi, transportez cette montagne hors de sa place. » Et comme les chrétiens étaient sous leur puissance, ils se trouvaient dans la nécessité ou de transporter la montagne ou d’embrasser la loi de Mahomet ; ou, s’ils ne voulaient faire ni l’un ni l’autre, ils étaient en danger de mort. Alors un fidèle serviteur de Jésus-Christ, exhortant ses camarades à avoir confiance en Dieu, et après avoir fait son oraison avec ferveur, commanda à la montagne de se transporter ailleurs. Ce qui arriva, au grand étonnement de ces infidèles, qui, à la vue d’un si grand miracle, se convertirent, et plusieurs Saracéniens embrassèrent la foi de Jésus-Christ.

XIX
Du pays des Perses.


La Perse est une province très grande et très étendue ; elle a été autrefois fort célèbre et fort renommée ; mais à présent que les Tartares l’ont en leur disposition, elle a beaucoup perdu de son lustre[1]. Elle est cependant considérable entre les provinces voisines, car elle contient huit royaumes. Il y a en ce pays-là de beaux et grands chevaux, qui se vendent quelquefois jusqu’à deux cents livres tournois la pièce. Les marchands les amènent aux villes de Chisi et de Curmosa (Kormus), qui sont sur le bord de la mer, d’où ils les transportent aux Indes. Il y a aussi de très beaux ânes, qui se vendent jusqu’à trente marcs d’argent ; mais les hommes de ce pays sont très méchants ; ils sont querelleurs, voleurs, homicides, et professent la religion de Mahomet. Les marchands sont par-ci par-là

  1. Ravagée par les Tartares, qui détruisirent la dynastie des Kharem Chal, qui avaient succédé aux Seldjoucides. (P.)