Page:Marco Polo et al. - Deux voyages en Asie au XIIIe siècle, 1888.djvu/61

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puis s’en retourna chez soi. En ces entrefaites Cingis, homme adroit, parla souvent à ceux de Moal et aux Tartares, leur remontrant comme quoi, étant sans chef, leurs voisins en venaient aisément à bout et les opprimaient. Ces peuples, considérant cela et y prenant goût, l’élurent pour leur capitaine, qui amassa aussitôt quelques troupes, et s’alla jeter sur les terres de Vut, qu’il vainquit en bataille et contraignit de se retirer au Cathay. Cingis prit une des filles de Vut qu’il donna pour femme à un de ses fils, qui devint ainsi père du grand khan Mangu, qui règne aujourd’hui. Ce Cingis donc envoya de tous côtés ses Tartares pour faire la guerre, ce qui a rendu leur nom si célèbre partout ; mais la plupart enfin y périrent ; de sorte que maintenant ceux de Moal veulent faire perdre la mémoire de ce nom-là et y substituer le leur. Le pays où ils parurent premièrement et où est encore maintenant la principale cour de Cingis-Khan, s’appelle Mancherule ; mais parce que la Tartarie est proprement le pays d’où ils commencèrent à faire leurs conquêtes partout aux environs, ils tiennent maintenant cette région-là pour la plus considérable de leur domination ; et c’est là où ils font l’élection de leur Grand Khan.



XX


De Sartach, des Russiens, Hongrois et Alains et de la mer Caspienne.


Pour ce qui est de Sartach, je ne saurais réellement dire s’il est chrétien ou non. Ce que je sais bien, c’est qu’il ne veut pas être appelé chrétien, et il me semble bien plutôt qu’il se moque des chrétiens et qu’il les méprise. Il fait sa demeure en un lieu par où les chrétiens, les Russiens, Bulgares, Soldains, Kerkis, Alains et autres passent, quand ils vont porter des présents à la cour de son père Baatu ; c’est alors qu’il fait plus de cas d’eux ; mais s’il y passe des Sarrasins qui en por-