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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes,2.djvu/37

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demi-heure après il ne restait, du monstrueux gigot, qu’un os parfaitement nettoyé, que nous cassâmes pour en sucer la moelle ; puis, comme cette chair fumée, en assouvissant notre faim, avait allumé notre soif, au lieu d’étancher celle-ci avec de l’eau pure, comme notre hôte nous le conseillait, nous envoyâmes chercher, dans nos bagages, quelques bouteilles de vin d’Espagne, dont nous lui offrîmes un verre.

Le repas terminé, la question du coucher fut débattue et résolue en quelques minutes. Le gouverneur, après nous avoir avoué qu’il ronflait très-fort en dormant, et que ce bruit nous importunerait, chargea sur son épaule les peaux de mouton qui formaient sa couche, et s’en alla passer la nuit chez un voisin. Restés seuls, nous nous empressâmes d’étendre nos pelions à terre, de rapprocher du mur les selles destinées à nous servir d’oreillers et de nous coucher côte à côte comme des poissons sur un gril.

Le vent souffla toute la nuit à travers les barreaux de notre demeure, montant du grave à l’aigu, descendant de l’aigu au grave, et secouant la toiture, comme s’il eût voulu l’enlever. Nos amis, que ces modulations de harpe éolienne avaient empêchés de dormir, se levèrent avec le jour, de fort mauvaise humeur. Plusieurs me déclarèrent, et don Pedro avec eux, que leur santé ne résisterait pas à deux