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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/268

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avait péri. Un numéro du journal El Comercio, que mistress Saunders me mit entre les mains, contenait, au sujet de la catastrophe, un long article en trois colonnes, qui avait fourni à son auteur l’occasion de parler de Manco-Capac, de l’ère de l’indépendance et des destinées glorieuses auxquelles le Pérou était appelé. Quant à la cause du sinistre, l’auteur l’attribuait à une trombe, qu’il appelait Bomba tifò. Mais mistress Saunders, mieux informée que lui, m’assura que l’inhabileté de l’équipage, composé d’Indiens pongos, qui voyaient un navire pour la première fois, jointe à l’état d’ivresse dans lequel se trouvaient le capitaine et son second au moment du départ, étaient les véritables causes du naufrage de la goëlette, naufrage qui occasionnait à son époux une perte sèche de cent quarante mille francs, aucune compagnie d’assurances maritimes n’ayant encore été créée aux alentours du lac Sacré.

Puis, comme un malheur n’arrive jamais seul, la mort de M. Reegle avait suivi de près le naufrage de la goëlette. L’infortuné, à la suite d’une de ces lectures de Young qui lui étaient familières, s’étant endormi le nez sur la table dans le voisinage d’une lumière, avait pris feu comme de l’amadou. Quand le pongo vint au matin pour renouveler les bougies et achever le peu de rhum oublié par son maître au fond des bouteilles, il ne trouva de ce dernier qu’une masse carbonisée à laquelle adhéraient