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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/279

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main du préfet, revêtu de sa griffe et du sceau légal, enjoignait en outre aux autorités civiles et militaires de Coporaqué de mettre leur personne et leurs biens à l’entière discrétion de l’arpenteur du génie, dans le cas où ce personnage, qui jouissait de toute la confiance de l’État, jugerait convenable de planter sa tente à Coporaqué et de faire de cette ville le centre de ses opérations géodésiques.

Cet avis officiel, dont les habitants d’une autre province eussent admiré la clarté, avait semblé si louche au gobernador de Coporaqué, qu’il était allé sur-le-champ le communiquer à son compère l’alcade, lequel, à son tour, en avait fait part à tous les notables de l’endroit ; bientôt administrateurs et administrés, sous le coup d’une panique étrange, s’étaient assemblés en conseil, avaient opiné du bonnet, et de retour chez eux, s’étaient empressés de réunir le peu de bijoux et d’argent monnayé qu’ils pouvaient posséder, et d’en bourrer leurs poches ; ces soins pris, et malgré l’induité de l’heure, ils s’étaient rendus chez le curé pour l’informer de ce qui se passait, lui faire part de leurs soupçons et de leurs craintes, et le prier en même temps de se charger de leur pécule à titre de dépôt, alléguant, pour faire excuser leur démarche, que le caractère sacré dont le pasteur était revêtu, serait une sauvegarde certaine pour leur numéraire. Le curé, en se rappelant à propos la parabole des loups et des bre-