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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/301

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que les péons étaient en train de harnacher, saluaient le lever du jour par des hennissements doués de la sonorité des cuivres. Bientôt, au roulement d’un tambour, qu’accompagnaient les trilles d’une flûte, douze Indiens marchant à la file entrèrent dans la place, dont ils firent deux fois le tour avec une précision remarquable. L’ampleur de leurs pectoraux, leur cou puissant et leurs jambes arquées dénotaient de vigoureux gaillards. Ces douze individus, fleur du sexe fort de Coporaqué, avaient été choisis par le gobernador pour escorter le colonel dans sa tournée. Leurs femmes et leurs enfants les suivaient pêle-mêle.

Ce détachement traversa la place et s’alla poster au seuil de l’église. Là quelques ménagères exhibèrent de leurs quêpés des tranches de viande de lama grillées sur les charbons, et les distribuèrent à leurs époux qui s’étaient accroupis en rond. Un plat de piment moulu fut placé devant les convives en guise de moutarde, et chacun d’eux fit honneur de son mieux à ce repas matinal. Les oisifs de la ville, attirés par ce spectacle et peut-être aussi par l’espoir de participer à la collation, ne tardèrent pas à augmenter le groupe de quelques centaines d’individus. Bientôt le diapason élevé des voix, les éclats de rire et les vibrations d’un charango qui appelait les amateurs à la danse, donnèrent à cette réunion, d’abord silencieuse, le caractère joyeux d’une ker-