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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/313

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ratifs du souper, j’allai prendre deux jarres de moyenne taille, que je plaçai devant l’âtre où elles devaient faire l’office de landiers. Restait à trouver une broche, et chacun fureta dans tous les coins pour découvrir l’ustensile en question ou son équivalent. En furetant aussi, j’eus le bonheur de mettre la main sur la quenouille de l’aïeule, et je la présentai à nos gens ébahis, après l’avoir soigneusement débarrassée de sa toison. À partir de ce moment les choses marchèrent à souhait. Une heure s’était à peine écoulée, que le colonel et moi nous étions accroupis sur le sol à la façon des musulmans, humant avec sensualité le cuissot de lama, rôti à point et convenablement salé, qu’on venait de nous servir dans un plat de terre. À ma prière, l’aide de camp Apolinario fut invité par son chef à partager notre souper, et l’air embarrassé avec lequel il s’assit près de nous témoignait tout l’étonnement que lui causait une pareille invitation. Il est vrai que, pour le rappeler au sentiment de son indignité, à supposer qu’il pût l’oublier un instant, le colonel lui fit déboucher les bouteilles, servir à boire, et ouvrir et fermer la porte, selon que la fumée ou le froid nous incommodait.

Le repas terminé, il fallut songer au bivac de la nuit : don Estevan opinait pour que nous fissions dresser nos almofrez à l’endroit même où nous avions soupé, c’est-à-dire à trois pas du feu ; mais je