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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/329

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je n’avais aucune idée de l’esprit des populations rurales de son pays ; que ces mêmes Caillomenos, que je supposais peu serviables, mettraient au contraire leur demeure au pillage pour nous engraisser de leur mieux, flattés qu’ils étaient à l’idée que leur province et leurs noms, jusqu’alors ignorés, allaient figurer dans un annuaire. Soit que ces indigènes fussent tels que me les dépeignait don Estevan, soit que leurs femmes, reconnaissantes de l’accueil que nous leur avions fait, les eussent décidés, bon gré mal gré, à faire une avance à l’État, aux approches du soir, nous vîmes déboucher sur la pelouse un convoi composé de deux ânes et de quatre lamas, qu’un Indien dirigeait vers nous. L’homme fut aussitôt acclamé, entouré, fêté par nos gens, tandis que le colonel envoyait Apolinario vérifier la nature et la qualité des vivres qu’on lui expédiait franc de port. Aucun des articles demandés ne manquait à l’appel. Une telle abondance de provisions arracha aux Indiens des exclamations de plaisir qui se changèrent en cris d’enthousiasme, quand don Estevan, après avoir fait distribuer à chacun d’eux une ration d’eau-de-vie, donna l’ordre de mettre la marmite sur le feu et d’apprêter un chupé monstre, auquel le conducteur du convoi fut invité à prendre part. À huit heures, l’homme se séparait de nous et reprenait avec ses bêtes le chemin de Cailloma, emportant nos bénédictions et nos remercîments pour