Aller au contenu

Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/337

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les ustensiles domestiques soigneusement fourbis furent accrochés au bât des mules ; tandis que les muletiers chargés de ce soin s’assuraient, par une enquête minutieuse, qu’aucun de ces objets ne manquait à l’appel, l’idée me vint de faire un croquis de notre Thébaïde. J’allai m’établir à distance, entre des rochers d’où l’on découvrait la caverne et ses alentours, nos gens et leurs bêtes, et un coin du lac où se mirait le ciel. En une demi-heure j’eus fini ma besogne. Comme je refermais mon album, une vague harmonie passa tout à coup sur l’aile de la brise. Je prêtai l’oreille ; bien que la distance et l’interposition de l’air dénaturassent un peu la qualité du son, je ne tardai pas à reconnaître la combinaison mélodique d’une guitare et d’une flûte, rivalisant entre elles de trilles et d’arpéges. Pendant que je demandais le mot de cette énigme au lac, aux serros, aux nuages, une clameur retentit au sommet de la colline et fut suivie presque aussitôt de l’apparition d’une troupe équestre, composée d’écuyers et d’écuyères, en tête desquels paradait Apolinario. Au risque de se rompre le cou, hommes et femmes lancèrent leurs montures à fond de train dans le sentier en pente qui conduisait à la caverne, et criant, chantant, s’abattant, se retenant les uns les autres, vinrent rouler sur la pelouse comme une avalanche vivante. Là chacun mit pied à terre aux cris répétés de : Viva el presidente ! viva el señor