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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/352

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Un abominable juron que je lâchai, comme pour ouvrir une soupape à ma colère, fut saisi au passage par l’écho de ces solitudes, qui le répéta tant de fois et avec des additions si pittoresques, que j’en conclus que le malheureux se dédommageait en cette occasion d’un silence de plusieurs siècles.

Cependant le soleil, longtemps vertical, commençait à décliner d’une façon sensible ; je voyais, avec un sentiment voisin de la stupeur, le fond des quebradas se décolorer par degrés, à mesure que la lumière remontait vers leurs bords supérieurs, et, forcé de suivre l’unique sentier qui s’offrit à moi, je continuais de marcher à l’aventure, passant d’une quebrada à l’autre et désespérant de trouver une issue à ce labyrinthe. Enfin le ciel eut pitié de ma détresse ; le maudit sentier changea bientôt de direction, se mit à monter au lieu de descendre, et me ramena dans la pampa, où je saluai par un cri de joie la Cordillère et le soleil. J’avais la première en face de moi et le second se couchait à ma droite.

À peu près certain d’être rentré dans la bonne voie, je ne m’occupai plus de relever la grande route et les villages indiqués par mes chanoines, jalons trompeurs qui n’avaient servi qu’à m’égarer ; et me guidant sur la Cordillère au pied de laquelle j’avais entendu dire que la ville d’Urubamba était située, je tentai de m’en rapprocher. Mon cheval,