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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/351

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Bientôt je comptai deux heures de marche, et ni les villages ni la route que mes yeux cherchaient obstinément de tous côtés n’avaient encore paru. Cet état de choses commençait à m’inquiéter. Pour ajouter à l’embarras de ma situation, le sol de la pampa, jusque-là très-uni, devenait de plus en plus accidenté, et la ligne droite que je suivais depuis Cuzco avec une précision géométrique, ne tarda pas à décrire une série d’angles qui variaient de base et de hauteur, selon la nature des obstacles que présentait le terrain. Tant que ces obstacles se bornèrent à des dunes de sable ou à des taillis épineux, je pus encore, en contournant les unes ou en passant au travers des autres, m’orienter à demi, et, comme un navire qui perd et gagne tour à tour sur le vent, suivre ma direction première ; mais lorsque de véritables collines eurent remplacé les monticules, que les crevasses du sol se furent changées en ravins et ces ravins en quebradas au fond desquelles il me fallait descendre au risque de me rompre le cou, j’avoue que je me repentis presque de n’avoir pas suivi les avis de mon chanoine, non pas tant pour le coucher lui-même, dont je pouvais fort bien me passer, que pour le mozo que j’en aurais chargé, et qui m’aurait servi de guide. Après une succession de descentes et de montées dont je ne calculai ni le nombre ni la durée, je m’aperçus que je tournais le dos au nord et marchais à l’ouest.