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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/6

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travail fût loin d’être terminé, je ne songeais nullement au départ. Installé dans une maisonnette solitaire du quartier de Huayna-Marca à demi cachée par de grands daturas en fleurs, possesseur d’une terrasse de six pieds carrés du haut de laquelle mes regards embrassaient dix lieues d’horizon, je me sentais, après cent agitations diverses, l’esprit si calme, si rafraîchi, si complétement heureux, que, pour prolonger cet état de quiétude, m’autorisant de l’exemple du philosophe grec, je remettais sans cesse au lendemain les affaires sérieuses. Trois mois passèrent comme un rêve dans ce doux far niente de la pensée, interrompu, ou pour mieux dire entretenu par des promenades à cheval faites aux alentours d’Aréquipa. Déjà mes compatriotes commençaient à s’étonner de ce qu’ils appelaient : — mon inconcevable paresse, — et quelques érudits de l’endroit, renchérissant sur eux, me pressaient vivement de partir pour Cuzco, où m’attendait une ample moisson de souvenirs historiques.

Afin de mettre un terme aux admonestations des uns et aux dissertations des autres, autant que pour dépister leur curiosité singulièrement éveillée par la prolongation de mon séjour, et l’allure mystérieuse de ma demeure toujours close, j’annonçai hautement mon intention de partir pour Cuzco, mais en me promettant tout bas d’abréger autant que possible ce voyage prématuré qui, pour me mettre en