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LE MARI PASSEPORT

trouve que ces libertés sont indignes d’une bonne musulmane.

Je riposte âprement :

— Tu n’avais qu’à répondre que c’est de sa faute, qu’il ne tient qu’à lui de faire cesser tous ces scandales en me donnant vite la permission de partir, au lieu de me retenir prisonnière ici.

Cependant le désarroi de Soleiman est aigu. Je deviens conciliante, et je promets à mon mari-passeport, car je devine qu’il parle dans notre intérêt, de ne plus recommencer. Je veux aboutir.

Y a-t-il au monde une agglomération d’êtres humains sans espionnage, ni ragots ?

Non, sans doute, puisque, le soir même, le sous-chef de la police vient me faire subir un interrogatoire en règle. Je lui réponds de mon mieux. Lorsque je lui dis que j’ai passé dix ans de ma vie en pension, de cinq à quinze ans, il ne comprend pas, car, en deux années de classe, l’instruction nedjienne est complète. Alors, qu’ai-je donc pu faire en tant de temps ?

Il veut savoir si je suis architecte ou médecin, quels sont mes diplômes et brevets, puisque j’ai tant étudié.

Ensuite c’est la question qui hante toutes les têtes d’Orient :

— Pourquoi t’es-tu faite musulmane ?

— Je crois que cette religion conduit à la vérité.

Il a, là, un mot étonnant.

— Seulement cela ? fait-il… « Bus ».

Il y a certes, un abîme, des abîmes entre nos deux cerveaux. En outre, mon arabe est misérable et nous ne nous comprenons qu’à demi. Je lui demande un interprète qui connaisse ma langue afin de mieux m’expliquer. Il cherche cet interprète, mais à Djed-