Page:Marguerite de Navarre - L’Heptaméron, éd. Lincy & Montaiglon, tome II.djvu/21

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
7
XJe NOUVELLE

approcher ses habillemens, de paour de les gaster.

À ce cry là entrèrent les Gentilz hommes, qui veirent ce beau spectacle & ne trouvèrent autre Cordelier qui la tourmentast, sinon l’ordure dont elle avoyt toutes les fesses engluées, qui ne fut pas sans rire de leur costé, ni sans grande honte du cousté d’elle, car, en lieu d’avoir des femmes pour la netoier, fut servie d’hommes qui la veirent nue au pire estat que une femme se povoit monstrer. Par quoy, les voiant, acheva de souiller ce qui estoit net & abessa ses habillemens pour se couvrir, oubliant l’ordure où elle estoit pour la honte qu’elle avoyt de veoir les hommes. Et, quand elle fut hors de ce villain lieu, la fallut despouiller toute nue & changer de tous habillemens avant qu’elle partist du couvent. Elle se fust voluntiers corroucée du secours que luy amena La Mothe, mais, entendant que la pauvre fille cuydoit qu’elle eust beaucoup pis, changea sa collère à rire comme les autres.


« Il me semble, mes Dames, que ce compte n’a esté ne long, ne mélencolicque, & que vous avez eu de moy ce que vous en avez espéré », dont la compaignie se print bien fort à rire, & luy dist Oisille :

« Combien que le compte soit ord & salle, congnoissant les personnes à qui il est advenu, on ne le sçauroit trouver fascheux ; mais j’eusse bien voulu voir la myne de La Mothe & de celle à qui elle avoyt admené si bon secours. Mais, puis que vous avez si tost