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Page:Marguerite de Navarre - L’Heptaméron, éd. Lincy & Montaiglon, tome III.djvu/132

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VJe JOURNÉE

leur sembloyt il n’y avoir pas esté ung quart. Au partir de là s’en allèrent à la contemplation de la messe, où chacun se recommanda au Sainct Esperit pour satisfaire ce jour là à leur plaisante audience, &, après qu’ilz eurent reciné & prins ung peu de repos, s’en allèrent continuer le passetemps accoustumé.

Et Madame Oisille leur demanda qui commenceroyt ceste journée. Longarine leur respondit :

« Je donne ma voix à Madame Oisille ; elle nous a ce jourd’huy faict une si belle leçon qu’il est impossible qu’elle ne die quelque histoire digne de parachever la gloire qu’elle a méritée ce matin.

— Il me desplaist, » dist Oisille, « que je ne vous puis dire à ceste après-disnée chose aussy proffitable que j’ai faict à ce matin, mais à tout le moins l’intention de mon histoire ne sortira poinct hors de la doctrine de la saincte Escripture, où il est dict : Ne vous confiez poinct aux Princes, ne aux filz des hommes, ausquelz n’est nostre salut, &, afin que par faulte d’exemple ne mectez en obly ceste verité, je vous en voys dire ung très véritable & dont la mémoire est si fresche que à peyne en sont essuyez les œilz de ceulx qui ont veu ce piteux spectacle :