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DU TOME SECOND

en 1504 à l’occasion de la mort du Duc Pierre de Bourbon, dit « qu’il l’a écrit par l’impulsion exhortatoire de Jehan de Paris, Painctre du Roy, qui par le bénéfice de sa main heureuse a mérité envers les Rois & Princes estre estimé un second Appelles. »

Geoffroy Tory, imprimeur & libraire de Paris justement renommé, publia en 1529 un ouvrage aussi curieux que singulier, dans lequel il essaya de réduire les lettres de l’alphabet aux proportions du corps humain. Il s’adressait aux habiles de son temps pour avoir des dessins. Jehan Perréal lui donna ceux des lettres L & K, ainsi qu’il nous l’apprend au folio XLVI v° de son livre : « Comme il peut estre facilement entendu en la séquente figure que j’ai faicte, après celle que ung mien seigneur & bon amy, Jehan Perréal, autrement dict Jehan de Paris, Valet de chambre & excellent Peintre des Roys Charles huitiesme, Loys douziesme & François, premier de ce nom, m’a communiquée & baillée moult bien pourtraicte de sa main. (L’Art & science de la vraye proportion des lettres Attiques ou Antiques, autrement dictes Romaines, selon le corps & visaige humain, &c. ; 1549, in-8o.)

Clément Marot a consacré le xxvie de ses Rondeaux à célébrer la mémoire de Claude Perréal, peintre lyonnais. Malgré la différence du prénom, M. Léon de La Borde n’hésite pas à reconnaître notre artiste, dont le gentil poète a dit :

En grand regret, si pitié vous remord,
Pleurez l’ami Perréal qui est mort.
Et vous, ses sœurs, dont maint beau tableau sort,
Peindre vous faut pleurantes son grief sort. — L.

— Je me permettrai de ne pas être de l’avis de M. de Laborde & de M. Le Roux de Lincy. Le xxvie rondeau de Marot : « Aux amis & sœurs de feu Claude Perréal, Lyonnois », dit seulement que ses sœurs peignaient. Claude Perréal devait être de la famille de Jean Perréal ; il n’est certainement pas le même &, puisque Marot parle du talent de peinture de ses sœurs, — qui peut-être ne faisaient que dessiner ou broder, car l’expression « dont maint beau tableau sort » peut aussi bien être vague que techniquement précise, — il n’eût pas manqué de dire qu’il était peintre lui-même ; le thème s’imposait de lui-même s’il se fût agi du peintre en titre des rois de France, & le poète n’y aurait pas manqué.

On pourrait aujourd’hui beaucoup ajouter à la note de M. Le Roux de Lincy ; mais, à propos de l’Heptaméron, il n’y a pas lieu de reprendre la biographie artistique d’un peintre, car, si la Reine de Navarre a connu personnellement le peintre en titre de son

Hept. IV.
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