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Page:Marguerite de Navarre - Les Marguerites de la Marguerite des Princesses, t. 1, éd. Frank, 1873.djvu/45

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l’affabilité de son abord tempère la majesté de sa démarche et de sa prestance. Marguerite conserva tard, nous dit-on, la fraîcheur de son teint, et bien qu’elle eût les traits un peu forts, le nez et la bouche un peu grands (elle ressemblait beaucoup à son frère), elle conserva aussi ce charme qui séduit plus que la beauté même. Un crayon nous la montre âgée de cinquante-deux ans et ravissante encore d’expression avec son doux visage attristé et méditatif. C’est bien la femme que Brantôme, délicat par hasard, met en scène d’une si heureuse façon dans le récit des amours de son frère, le capitaine de Bourdeille, avec Mlle de la Roche; il faut lire dans les Dames galantes cette poétique entrevue sur une tombe, et la touchante apostrophe de la reine au jeune homme[1] .

Mais qu’on ne se représente pas la reine de Navarre tranquille dans son palais, sans autres ennuis que ceux qui viennent du regret des choses passées. Vieillie par mille douleurs qui avaient leur source dans les espérances mainte fois trompées, dans les élans mainte fois refoulés d’une âme généreuse, elle devait cependant pourvoir à tout. Henri d’Albret, dont elle endurait les infidélités et les violences, lui cédait volontiers la plus lourde part du fardeau commun et l’honneur de la lutte. Elle était la reine et le roi de Navarre ; d’Alençon, de Bourges, de toutes parts on s’adressait à elle. « Elle trouvait, dit M. de La Ferrière-Percy, le moyen de secourir dans sa détresse sa belle-sœur, Isabeau d’Albret, mariée à M. de Rohan ; de fournir aux dépenses... de la maison de Jeanne d’Albret...

  1. Brantôme, Dames galantes, cinquième discours.