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LA COCHE

Et toutes trois nous mismes en la Coche
Qui attendoit nostre departement,
Courants après les autres vistement.
Mais en allant pour oster le discord
De leur propos et les mettre d’accord,
Je leur requis vouloir un Juge prendre,
Qui leurs debats voulust et peust entendre.
Car, aussi tost que l’une j’escoutois,
De son costé soudain je me mettois ;
Et puis, quand l’autre avoit compté son cas,
A qui ne fault bailler nulz advocats,
Je me rendois à son opinion.
Pour les tenir donques en union,
Un bon esprit leur estoit nécessaire.
Et quant à moy, je m’obligeois de faire
Tout mon povoir, que je sens trop petit
Pour reciter non à mon appetit
Tous leurs propos, mais au moins ma puissance
N’espargneray à donner congnoissance
De leurs ennuys, comme leur ay promis.
Sans qu’un seul mot de leurs dits soit obmis.
Nostre debat (ce me dis la première)
Met nostre esprit en telle obscurité
Qu’il ne nous fault bien petite lumiere
Je n’en sçay qu’un qui, à la vérité,
Puisse juger qui plus ha de douleur
Et plus d’honneur par souffrir merité :