Page:Margueritte - À la mer, 1906.djvu/45

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pleines d’une bonne volonté mutuelle qui n’avait pas abouti.

— Comment ! s’écria Albert, tu es à Vimeuse ?

Il regardait Emonot avec une surprise réjouie et un certain respect, parce que ce dernier avait remporté tous les premiers prix de sa classe, et en même temps, la supériorité latente de son camarade, son sérieux qui ne le faisait jamais se prêter aux farces et aux mutineries, ses yeux purs et froids qui semblaient ignorer les choses laides de la vie de collège ou plutôt vouloir les ignorer, tout cela lui inspirait un embarras et comme une petite honte à lui qui, déjà si peu parfait, se sentait hanté de pensées troubles, en crise de seize ans, la puberté venue.

— Viens que je te présente à ma mère ! dit Emonot.

Une angoisse ressaisit Albert et il balbutia des excuses, cherchant des gants dans sa poche, rehaussant son col étroit, mais Pierre le rassurait, d’un air d’indifférence et le conduisait vers une cabine tapissée de nattes de jonc, dans laquelle une femme aux cheveux blancs, à taille élégante, travaillait à un ouvrage de tapisserie ; elle leva les yeux en les voyant venir et tandis que Pierre disait :