Page:Marie-Victorin - Croquis laurentiens, 1920.djvu/195

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
187
LE HAVRE-AU-BER

chipel ce délicieux nom, Les Ramées, malheureusement tombé dans l’oubli.

Des falaises d’un rouge lumineux, des collines d’un vert intense, arrondies et bombées comme des poitrines, d’immenses lagunes tranquilles et ensablées, des horizons d’eau et de sable, tels sont les éléments groupés et combinés de toutes les manières possibles, pour réaliser ce prestigieux concert de lignes et de couleurs qui nous prend l’âme toute, nous retient sans que nous sachions pourquoi, et nous fait dire quand le vapeur borgote pour la dernière fois : Déjà !

Le voyageur n’a pas le choix des moyens pour aborder aux Îles. Traversant les provinces maritimes, il prend à Pictou un petit paquebot qui, escale faite à Souris, paraît en vue des Îles après quelque douze heures de navigation. Dès Pictou on peut pressentir les Madelinots qui y forment une petite colonie ayant son centre à l’Hôtel Royal. C’est déjà plaisir d’entendre les premières sonorités du dialecte acadien, de voir des enfants plein les escaliers et de manger le cake préparé par Marie, une plantureuse Madelinote qui, ayant marié en secondes noces le garçon à Ben Eloquin, s’en est venue chercher fortune sur la grand’terre, où elle s’arroge une sorte de maternité générale sur tout ce qui sort des îles ou y entre.