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CROQUIS LAURENTIENS

II

Lorsque le printemps, par souffles larges, nous arrive ensoleillé des grandes terres du sud, les tout premiers, liards, vous répondez à l’appel passionné de la vie créatrice ! Au bout des rameaux gris, vos bourgeons emmiellés, gorgés du sang clair de la terre bouillonnante, éclatent et suspendent dans l’air tiède, les uns, de lourdes chenilles de laine pourpre, les autres, de longs chatons verts qui, avant tous les autres arbres et malgré votre âge, vous font chanter l’amour éternel ! beaux grands vieillards toujours tremblants !…

III

Lorsque mai devient plus chaud et que le cri des merles en donne le signal, vous livrez à tous les vents, liards, la poussière d’or de vos anthères. Et pour que, sans obstacles, vous portiez la vie et la fécondité à vos compagnes qui, dans la plaine, là-bas, tendent au ciel nouveau, dans l’extase mystique du « joly mois de may », leurs bras chargés de rosaires priants, l’air tout entier vous appartient, grands semeurs de pollen ! beaux grands vieillards toujours tremblants !…