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CROQUIS LAURENTIENS

La route ensablée qui monte vers le cimetière est toujours déserte, et loin, très loin, sans relâche, le pic fouille le cœur sec des arbres morts…


La neuvaine

La rivière du Nord est délicieuse à l’heure du couchant. Suivez la route qui, laissant St-Jérôme, remonte la rive droite ; vous cheminerez sur un sentier durci, bordé d’armoises et de tanaisies, avec, dans l’oreille, la basse assourdie et profonde de l’eau franchissant d’un saut les barrages. Des deux côtés il y a des maisonnettes en bois, pas prétentieuses, avec de blancs enclos autour des jardinets, avec des chapelets d’enfants, un peu défraîchis par la chaleur du jour, et qui s’ébattent devant les portes.

Mais ce soir, les seuils sont déserts et un silence inaccoutumé accueille les premières ténèbres. Seules, et avec des airs de fantômes, les vaches broutent encore sans lever la tête, parmi les gros rochers semés dans les pâturages. Inconsciemment, le mutisme des choses nous envahit et nous marchons sans mot dire.

Mais voici qu’au travers du grondement continu de l’eau, passe un bruissement de prières ;