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les forçats du mariage

amical ; mais il aborda la princesse, malgré la mine allongée du petit baron qui l’accompagnait.

La princesse l’accueillit fort gracieusement. C’était une femme de trente-huit ans qui voulait en paraître éternellement vingt-huit.

Bien qu’elle se maquillât, abusât de la poudre de riz et des poses languissantes, son incontestable beauté suffisait, indépendamment de son titre de princesse, à légitimer les nombreux hommages qu’on lui adressait.

Mais auprès de la brûlante passion que lui inspirait Juliette, cet amour à la neige, un peu précieux, laissa Robert complètement froid.

Les œillades coquettes de cette femme déjà vieillotte l’agaçaient, car il avait sans cesse devant les yeux, obstiné comme une idée fixe, l’ardent regard de Juliette. Il accepta néanmoins, pour se distraire, l’invitation à dîner de la princesse.

À neuf heures, il la quitta, las, ennuyé, mais toujours fiévreux.

Il se rendit chez Nana, dont la verve endiablée pourrait, pensa-t-il, l’étourdir un moment.

La joyeuse fille l’accueillit à bras ouverts.

— On en a donc assez de sa bêtasse de femme, s’écria-t-elle. Ah ! tant mieux ! Vrai, tu nous manquais. Se marier, quand on a encore devant soi dix ans de folle vie ; grignoter une croûte légitime quand on peut mordre à belles dents les pommes défendues ! Je te le disais bien, que tu nous revien-