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les forçats du mariage

drais. Sais-tu que tu as vieilli, ô patriarche ? Le mariage ne te réussit pas, mon vieux ! Reviens avec nous. Va ! nous retrouverons encore quelques beaux jours. Pauvre mouton, il est triste, tout ahuri. Et c’est nous qu’on accuse d’abrutir la jeunesse. Les ingrats ! sans nous, la vie serait gaie comme un cimetière. Je gage que tu es tombé sur une femme qui pleurniche. Les séducteurs comme toi ont toujours cette chance-là. Et tu en as par-dessus les yeux, je comprends ça. Il n’y a que nous, vois-tu, pour savoir prendre la vie du bon côté. Et comme tu arrives bien ! J’ai pour protecteur, dans ce moment-ci, un jeune innocent qui gobe tous mes beaux serments d’amour éternel et qui s’est fourré dans l’esprit que je l’adore. Il veut m’emmener, où donc ça ? Plus loin qu’en Amérique, en Italie, je crois, pour filer le sentiment sur le bord d’un lac bleu comme le ciel. Il faut entendre sa tartine sur le lac. Je te la payerai gratis, si le cœur t’en dit. Je soupçonne qu’il ne veut m’emmener sur le bord d’un lac que pour faire des économies, le pingre ! Dès que je l’aurai plumé, et ce sera bientôt fait, comme je l’enverrai se promener sur son lac, mais tout seul ! Car j’ai beau faire, je ne puis aimer que toi. Tu ne m’as jamais demandé la constance, voilà pourquoi je te suis fidèle. — Vive Robert ! Robert for ever ! On dit que tu es riche comme un Crésus. Il y a comme cela des gens nés coiffés. Leur existence est une pluie d’or perpétuelle. Mais je bavarde