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les forçats du mariage

pouvait amener une provocation. Ce serait un duel à mort.

Cependant Robert, pour se distraire du départ de Juliette et secouer l’impression pénible de cette dernière scène, était allé chez Cora, dont la sérénité, l’enjouement spirituel, feraient une diversion agréable aux emportements passionnés de Juliette.

Il commençait à douter pourtant qu’on pût entamer cette vertu.

— Bah ! lui dit-il en la quittant, sous votre air gracieux et votre physionomie toute française, vous cachez une âme de quakeresse. Les quakeresses me sont antipathiques. On les respecte, mais on ne les aime pas. Décidément, je ne vous aime plus.

— Alors, vous vous avouez vaincu ? Voyons, essayez encore. Venez avec nous dans la Beauce, passer quinze jours.

— Quoi ? dans ce pays plat, monotone comme un cœur sans passions ? Je conçois que vous adoriez votre Beauce. Moi, je n’aime que les pays tourmentés, aux précipices insondables, aux torrents impétueux, aux rocs déchirés.

— Eh bien ! allons en Suisse.

— J’irai où vous voudrez. Je m’ennuie. Tenez ! aimez-moi un peu par charité.

— Je vous aimerai beaucoup ; mais il faut d’abord vous convertir. Vous avez trop de vices, vous me faites peur.