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les forçats du mariage

noirs paraissaient en pleine lumière d’un jaune brun. Son regard, parfois insaisissable comme sa nature fantaisiste, pouvait exprimer, dans la même heure, tous les contrastes, toutes les nuances de l’esprit, ou toute la gamme des passions humaines. Ce qui dominait pourtant, c’était une expression d’ardeur voluptueuse, non-seulement dans le regard, mais dans le tour des paupières et le bas du visage déjà fatigués, dans la narine soulevée, dans les lèvres sensuelles, rouges, un peu grasses, et jusque dans les dents petites et brillantes, où se lisait l’impatience du désir.

Sa structure élégante et svelte n’accusait point la force ; cependant on devinait dans cet homme une vitalité nerveuse très-puissante. Sa main petite et blanche comme une main de femme, molle et fiévreuse comme celle des hommes adonnés aux voluptés, avait pourtant des muscles d’acier. On citait de Robert des faits qui dénotaient une vigueur peu commune.

C’était bien réellement, comme il le disait lui-même, une créature de luxe faite pour le plaisir, pour ses excès et ses fatigues.

Gâté par son père, par sa mère, par toutes les femmes, resté maître dès vingt ans d’une grande fortune, il ne semblait pas se douter à trente ans que la vie pût cacher des obstacles et des déboires. Sa ruine l’avait étonné plutôt qu’attristé. Il comptait sur un prompt secours ; car très-naïvement