Page:Marie Louise Gagneur Les Forcats du mariage 1869.djvu/334

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
328
les forçats du mariage

regard était ardent ; ses joues, ordinairement si pâles, étaient d’un rose vif.

Elle avait en effet la fièvre, la double fièvre de l’espoir et de l’angoisse. Pourrait-elle mener à bien son projet d’évasion ?

Dès qu’Étienne, après lui avoir dit bonsoir, eut fermé la porte, dès qu’elle entendit son pas s’éloigner, elle s’élança hors du lit, jeune, alerte, vigoureuse. Il semblait que toute son ardeur et toutes ses forces lui fussent revenues, comme par miracle.

Elle s’habilla à la hâte. Puis elle entassa pêle-mêle dans un portemanteau les objets disposés à l’avance.

Le plus léger bruit la faisait tressaillir, lui causait comme des défaillances : car Étienne pouvait rentrer.

Sa petite malle terminée se trouva trop lourde ; elle ne put la soulever. Elle rejeta dehors quelques effets au hasard. Puis elle alla au berceau de sa fille, en souleva le rideau.

L’enfant souriait dans son sommeil. À la vue de ce joli visage rose, de ce charmant petit être, si confiant au bonheur, son amour maternel se réveilla impérieux, passionné. Elle éprouva, dans ses entrailles de mère, un déchirement suprême. Elle se laissa tomber à genoux, entoura la couchette de ses bras, attacha ses lèvres à la petite main potelée qui reposait sur le bord du berceau ; et le cœur gonflé, les yeux pleins de larmes :