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Les Russes étaient arrivés à portée de la voix ordinaire. Le colonel qui les commandait, ayant aperçu les deux Valaques, s’écria en roumain, mais avec un accent étranger très-prononcé : — Loc ! Facetzi loc ! (Place ! faites place !)

La recommandation était inutile, les deux Isacesco se tenaient adossés au talus qui formait comme une muraille de terre. Les Russes avaient trois chevaux de front, ils allaient comme le vent et le chemin ne comptait pas plus de trois mètres de largeur.

Loc ! répéta l’officier, loc !

Ils ne pouvaient reculer davantage. Ioan allait répondre quand ses yeux rencontrèrent le visage blafard du colonel russe. Ses terribles sourcils se froncèrent : il venait de surprendre un sourire moqueur dans les yeux verdâtres de l’officier qui ne cessait de hurler : loc ! loc !

Le colonel lança son cheval sur les deux Roumains et s’adressant au vieux Mané : — Depuis quand un serf demeure-t-il, le bonnet sur la tête, devant un boyard ? s’écria t-il avec un accent féroce. Et d’un geste rapide, il fit tournoyer une mince cravache qui passa comme un éclair sur le front du vieillard.

Des éclats de rire retentirent derrière l’insulteur. Un cri de rage leur répondit. Ioan, pâle de courroux et brandissant son poignard, s’était élancé à la tête du cheval ; il serrait le mors de la main gauche, et de la droite il allait frapper le cavalier, lorsque celui-ci, se dégageant brusquement, dégaîna.

Le sabre s’abattit violemment sur la main du dorobantz, un flot de sang jaillit, mais le poignard demeura ferme entre les doigts de fer d’Isacesco.

Si le Valaque était fort, le Russe était adroit. Poussant une exclamation gutturale, il enfonça ses éperons dans