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les flancs de son alezan qui partit au galop, entraînant le dorobantz, qui alla tomber sanglant sous les pieds des chevaux cosaques.

Quand il se releva, le vieux Mané était à ses côtés. Isacesco promena autour de lui un regard étrange ; le sang tombait goutte à goutte de ses doigts et rougissait l’herbe ; il ne sentait pas sa blessure, il ne voyait pas son père, il ne savait, il ne comprenait qu’une chose : son adversaire était hors de son atteinte ! Il croisa tranquillement ses bras sur sa poitrine et regarda filer les Russes à l’horizon. Et quand le dernier soldat eut disparu à ses yeux, quand le bruit du dernier sabot frappant le sol eut cessé de retentir à son oreille, il murmura d’une voix sourde :

— Quel que tu puisses être, toi, l’homme aux yeux jaunes, ce que tu as fait à mon père, et ce que tu m’as fait à moi, je jure, ici, devant Dieu, de te le rendre au centuple !


II

Ce qu’était Boris Liatoukine.

Ce même soir de mai, un joyeux bruit de causerie et de verres entrechoqués s’échappait d’une des salles de l’hôtel Hugues, le plus aristocratique de Bucharest. Un essaim de jeunes officiers russes, arrivant en droite ligne d’Iassi, y prenaient leurs ébats.

Des tessons de bouteilles gisaient par terre, et, à la seule façon dont ces aimables jeunes gens engloutissaient