Page:Marie de Compiègne - L’évangile aux femmes.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
16

At ille stultus, dum vult vocem ostendere,
Emisit ore caseum, quem celeriter
Dolosa Vulpes avidis rapuit dentibus.
Tum demum ingemuit Corvi deceptus stupor.
Hac re probatur quantum ingenium valet ;
Virtute semper prœvalet sapientia.
[1]

D’UN CORBEL QUI PRIST UN FROMAIGE[2].



Ensi avint, e bien puet estre,
Ke par devant une fenestre,
Ki en une despense feu,
Vola un Corb ; si a veü
Furmaiges qui dedens esteient ;
Et seür une cloie giseient ;
L’un en a pris, si s’en reva.
Un Vorpilx (Renard) vint, si l’encuntra,
Dou fourmage ot grant desirier
Que il en puist sa part mengier.
Par engin (ruse) volra essaier
Si le Corb purra engingnier (tromper).
« Ha ! Diex sire ! (Seigneur Dieu !) fit li Gorpix,
« Cum ist or (certes) cest oisiaus gentix !
« El munde n’a si bel oisel ;
« Unc (jamais) de mes elx (yeux) ne vi si bel.
« Fust tieus ses chans cum est ses cors (si son chant était tel

[que son corps).
« Il vaurait miex que nuls fins ors. »

Li Corbs s’oï si bien loer,
Qu’en tot le munde n’ot sun per (son pareil) ;
Purpensez s’est (il s’est imaginé) qu’il cantera,
Pur canter sun los ne perdra ;
Sun bec uvri, si cummença ;

  1. La fable de Phèdre a deux morales, l’une au commencement, l’autre à la fin ; celle de Marie n’en a qu’une, à la fin, laquelle se rapporte plutôt aux deux premiers vers de Phèdre.
  2. Dans le manuscrit du président Fauchet, on lit : Li parole du Coc et du Gorpil, et ailleurs : Dou Corbel e d’un Werpil. Je dois prévenir du reste que je prends le texte tel qu’il est dans l’édition Roquefort, avec ses incohérences d’orthographe, et la combinaison des divers manuscrits familière à l’éditeur.