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LAI D’ELIDUC

barque, et les vents propices le conduisent dans son pays. Sitôt qu’il est de retour, il en instruit son prince, qui est fort joyeux de cette nouvelle. Ses parents, ses amis, enchantés de le revoir, viennent le féliciter, surtout sa bonne femme qui joignoit à la beauté, la sagesse et la générosité. Mais Eliduc, malgré les marques d’amitié qu’il recevoit, étoit toujours triste et sombre, à cause de sa passion. Jamais il n’aura de plaisir que lorsqu’il sera près de sa belle. Son air chagrin alarme sa femme, qui ne peut en soupçonner la cause. Souvent elle le questionna pour lui demander, si pendant son absence, il avoit appris qu’elle lui eût fait la plus légère offense. Dites-le moi, mon ami, je prouverai publiquement mon innocence. Non, madame, je n’ai rien entendu dire sur vous, mais j’ai juré au roi du pays d’où j’arrive de revenir près de lui parce qu’il a besoin de mon courage. Si le roi, mon seigneur, signoit la paix, huit jours après je ne serois plus ici ; je supporterai bien des peines avant de revenir, et jusqu’à cette époque je n’au-